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Les Yeux verts m’ont dit

 
 
 
Du même auteur
 
 
 
Chronique d’une enfance inachevée,

éditions Publibook, 2006

 

 

 

Jacqueline Corbisier
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Les Yeux verts m’ont dit
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
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Tél. : +33 (0)1 53 69 65 55
 
 
 
 
 
 
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Cet ouvrage a fait l’objet d’une première publication aux Éditions Publibook en 2013

 

 

 



 
 
 
                    Retrouvez l’auteur sur son site Internet : http://www.jacquelinecorbisier.be
 

                                                                           
 
 
 
                                                                       Remerciements
 
 
 
Merci à Ivan Greindl pour sa patience et ses conseils judicieux lors de la correction du manuscrit.
 
Merci à vous chers lecteurs qui avez aimé Chronique d’une enfance inachevée et en attendiez la suite.
 
Merci surtout aux personnages réels ou imaginaires fictifs de cette histoire. Attachants ou non, c’est grâce à eux qu’elle existe et vous parvient aujourd’hui.

 

 

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   Ce résumé succinct de Chronique d’une enfance inachevée,  vous aidera à situer les personnages dans le temps et à mieux les suivre dans cette seconde partie.  

 

  Après la guerre 1940-1945 Flore et Jules, les parents de Micky, se retrouvent ruinés, leur usine de lin à la frontière française ayant été détruite par les flammes. 

  La promesse d’un avenir radieux pour leur fille Micky dans les colonies fera tomber leurs dernières appréhensions et ils accepteront alors le mariage de leur fille avec Henry, haut-fonctionnaire au Congo. 

pleine d’espoir, Micky embarquera sur le bateau «le Matadi » pour une vie aisée au Congo Belge.

 

  De cette union, naîtra la blonde et jolie Clara, aimée et adulée par son père. Hélas, peu après, Henry révèlera une personnalité violente et en manque de tendresse, Micky se consolera alors des absences de son mari dans les bras de Benoît.

  Henry découvrira cette relation, et… Julie, naîtra peu après.

  Durant toute son enfance la bâtarde sera le second prénom  de cette fillette, sauvage et rebelle.  

 

  1960, La guerre éclate et l’Indépendance s’ensuit. Henry se refusera de quitter le Congo, en raison de ses fonctions. Micky, devenue proche du Président Tshombé, suivra Henry dans son refus. 

  Les deux fillettes seront expédiées en Belgique, Julie à la garde de sa grande sœur Clara. Elles se retrouveront dans une famille d’accueil.

  Micky et Henry rentreront par la suite en Belgique, puis Henry repartira seul...

 

   Micky ne parviendra pas à dompter le caractère difficile et rebelle de ses deux filles. Séparées, elles passeront de pensionnat en pensionnat et après bien des péripéties, Julie, l'indépendante, la fugueuse aboutira en maison de redressement.  La vie sourira enfin à Micky : en la personne de Doug, militaire américain caserné au SHAPE. Elle le suivra lors de son retour au pays de G.I., , laissant ses deux filles en Belgique. 

  Clara a dix-sept ans, Julie quatorze, lorsqu’elles se retrouvent livrées à elles-mêmes. Clara partira rejoindre son père, Henry, au Zaïre. Julie refusera de quitter la Belgique : elle a rencontré Raymond. Par le biais de la famille de Raymond, Julie fera la connaissance de Michel, étudiant en médecine. Il deviendront, au fil du temps, des amis sincères.  Michel restera toujours présent dans la vie de Julie, confident chaleureux dans les moments de bonheur comme dans les épreuves. 

  De sa relation avec Raymond, un mois avant ses 18 ans, Julie aura un fils, David.  Hélas, ce bonheur ne sera pas éternel; trois ans plus tard, Julie découvrira l'infidélité de son compagnon: il a un fils, né d'une autre relation, 6 mois après David.

  Déçue, blessée, Julie part vivre chez sa mère, aux États-Unis avec son fils à Raymond.  

 

  Dans la suite de ce roman, Julie attire plus que jamais aventures et mésaventures et se retrouve, mais du bon côté cette fois, employée dans le bureau du shérif, à Sandy (UT),  à l’Ouest des États-Unis.
 
 
 
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                                                                             1978
 
 
 
   L’hiver touche à sa fin. Les montagnes Rocheuses découvrent peu à peu leur robe grise, là où la neige a fondu. Le shérif tire Julie de ses pensées en fulminant :

— Il y a encore eu un meurtre dans les Rocheuses,  une jeune femme scalpée et écorchée au niveau de l’abdomen. C’est la troisième depuis le début de l’année et il y a toujours aussi peu d’indices. Seule une boîte de cigares Cohiba, retrouvée sur chaque scène de crime, laisse à penser que le tueur est un homme.

  Julie avait lu les rapports d’enquête précédents ; elle avait noté un détail troublant : le réservoir des voitures de chacune des victimes était plein. Or, la seule station-service des environs était située sur la route menant aux Rocheuses, non loin du mobil-home de ses parents. Elle en informa le shérif. Celui-ci décida aussitôt d’y passer régulièrement pour remplir le réservoir ou prendre un café, afin de noter les clients habituels.

Comme Julie n’avait toujours pas appris à conduire, le shérif la ramenait souvent chez elle mais parfois elle rentrait à pied. Marcher seule l’aidait à réfléchir et la détendait. En la quittant, il lançait en boutade :

— Sois sage et prudente !

  À son arrivée chez sa mère, elle trouva Micky, jouant avec David. Ce dernier, à la vue de sa mère, courut vers elle, et se suspendit à son cou. Micky, contrariée, tendit à Julie une lettre de Raymond, le père de David. Il la suppliait de lui pardonner son infidélité et lui promettait une vie nouvelle, si elle lui accordait une seconde chance. Il ne pouvait envisager de vivre sans elle et leur fils. En dépit de ses bonnes résolutions, Julie en fut émue : David parlait souvent de son Papa.

  En effet, à Sandy, la vie n’était pas toujours gaie. Julie était venue se réfugier auprès de sa mère, après sa rupture.

  Depuis son arrivée, Micky n’avait eu de cesse de lui reprocher cette relation et ses conséquences.

 

 

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  Troublée par la lettre de Raymond, qui cependant avait trahi sa confiance, Julie se surprit à penser qu’elle aimerait lui répondre « Viens, je t’attends ! » Mais il y avait Diane, sa nouvelle compagne et leur enfant.       C’était pour elle qu’il les avait quittés, David et elle…

  Pourrait-il vivre sans eux ? Les abandonner à leur tour, pour rejoindre Julie et David aux USA ? Julie réalisait le déchirement de Raymond ; serait-il possible, dans ces circonstances, de recréer une vie familiale heureuse à Sandy ?

   Elle appela au téléphone Clara, sa sœur et confidente, lui exposa ses doutes… et comprit qu’elle espérait vraiment la venue de Raymond. Elle chargea sa sœur de l’informer qu’elle l’attendait pour lui redonner une chance.

   Le cœur étrangement serein et plein d’espoir, elle raccrocha le téléphone. Aussi, quand David lui demanda : — Il vient quand mon Papa ? Elle répondit en souriant :

— Bientôt, mon chéri.

  Le lendemain, à son retour du travail Julie se dirigea vers la station-service, devenue pour elle un but de promenade. Elle y entra en fredonnant et trouva le patron, affairé derrière le comptoir. Le saluant amicalement, elle commanda un café, qu’elle but debout, accoudée à l’une des hautes tables rondes.

  Le patron, étonné de la voir seule, lui demanda si le shérif l’accompagnait. Julie lui confia son envie de profiter du beau temps pour marcher un peu, seule. Il la regarda partir, souriante.

  Le crépuscule tombait quand elle arriva au lotissement ; elle pressa le pas, soudain effrayée à l’idée de la présence d’un tueur dans la région.

  Peut-être me suit-il et m’observe-t-il en ce moment ? pensa-t-elle. Elle en eut si peur qu’elle courut vers le mobil-home. Soudain quelqu’un la prit par le bras. Elle poussa un cri, mais c’était Larry, leur voisin. Il guettait son retour en compagnie de David. Ce dernier, tout heureux de sa farce, riait et sautillait en disant:

— Ma maman a eu peur, ma maman a eu peur !

  Julie remercia Larry de s’être occupé de David et rentra dans le mobil-home.

  Micky et son mari, Douglas, n’étaient pas encore arrivés. Voulant leur faire une agréable surprise, elle prépara le dîner : un robuste steak, accompagné de frites et de salade.

 

 

 

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  Malheureusement, elle avait tout à fait oublié la raison de l’absence de ses parents : une séance chez le dentiste, qui devait extraire les dernières dents de Douglas ! Croyant à une mauvaise plaisanterie de sa belle-fille, il se retira en ronchonnant dans sa chambre, emportant au passage une assiette de bouillie.

  Pour détendre l’atmosphère, Julie raconta à Micky comment se passaient ses journées de travail « au fichier de la police » du comté ; elle omit soigneusement d’évoquer l’enquête en cours sur le tueur, pour ne pas l’inquiéter : sa mère la croyait employée comme dactylo et l’interrompit assez sèchement ; cette réaction dérouta Julie :

— Tu as un travail maintenant ; n’envisagerais-tu pas de trouver un logement ?

Prise au dépourvu, Julie ne répondit pas. Elle avait l’espoir de voir Raymond la rejoindre et n’envisageait pas d’entreprendre une nouvelle vie sans lui. Pour ne pas envenimer la discussion, elle embrassa sa mère et s’en alla coucher David, en le cajolant.

 

                                                                                   * * *

 

  Le matin suivant, Julie avait congé ; Larry lui proposa à de venir avec lui à la réserve indienne. Il commerçait avec les Indiens, leur achetait les produits de leur artisanat et les revendait dans des boutiques pour touristes. Elle pourrait l’aider et cela distrairait David.L’enfant ayant entendu le mot « Indien » demanda tout heureux :

— De vrais Indiens ? Avec des plumes ?

  Larry le hissa dans le van et ils prirent la direction de la réserve dans la bonne humeur. À leur arrivée, Larry et son épouse Maggy se dirigèrent vers le Chef de la tribu ; il les accueillit la main levée en signe de paix et de bienvenue. Le petit David, impatient, ne songeait qu’à lâcher la main de sa mère pour courir partout. Amusé par son enthousiasme, le Chef demanda à l’un des membres de la tribu de faire visiter le village à Julie et son fils.

  Ce dernier avait bien du mal à cacher sa déception : les guerriers et leurs squaws, qu’il imaginait vivant sous des tepees, habillés de peaux et coiffés de plumes, habitaient des maisons de bois ou des mobil-homes. Ils portaient des jeans et des chapeaux stetsons comme tout le monde, conduisaient des camionnettes bariolées !

 

 

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  Où donc étaient les fougueux mustangs dont il avait rêvé ? Leur guide lui expliqua gentiment que les vêtements traditionnels étaient réservés aux jours de fêtes ou alors pour des spectacles à l’intention des touristes. Attendri par la mine déconfite de l’enfant, l’Indien le prit par la main et l’entraîna vers les pâturages. Là, son petit visage s’illumina :

— Les fevaux des Indiens ! Maman, regarde !

  L’homme souleva David de terre, le posa sur le dos d’un poney, sauta derrière lui et fit signe à Julie d’en faire autant. Celleci, crânant et affichant une feinte assurance, empoigna la crinière de l’animal comme elle l’avait vu faire par leur guide et se hissa sur le dos du poney. Ils entamèrent ainsi la promenade, à cru. Julie se sentait en confiance sur sa monture et, imitant l’Indien, donna des coups de talon dans les flancs de l’animal.  

  À sa surprise, le poney obéissant partit au galop. Ignorant comment l’arrêter, Julie concentrait toutes ses forces à se maintenir sur son dos. Filant comme le vent, s’en donnant à cœur joie dans les pâturages, le poney se dirigea vers la rivière, qui déambulait paresseusement entre les arbres. Là, il s’arrêta net et sans prévenir ! Julie, se retrouva tête en bas, toujours accrochée au cou du poney. Pour s’en débarrasser, le coquin se vautra dans l’eau. Trempée, Julie tempêtait, s’efforçant de retirer sa jambe, coincée sous le garrot de l’animal ; le guide indien et David riaient aux éclats.

  Julie regagna la rive, le cheval s’ébroua encore un peu dans l’eau puis vint calmement les rejoindre. Julie ré-enfourcha bravement son poney, l’Indien, cette fois, le tenant par la bride.

L’arrivée peu glorieuse d’une Julie aux vêtements trempés, déclencha l’hilarité générale. Bonne enfant, elle s’y joignit volontiers, avant d’enfiler une vieille salopette tachée de cambouis qui traînait dans le van de Larry.

  De retour à la maison, David raconta en riant les avatars équestres de sa maman et sa trempette forcée dans la rivière. Ce qui entraîna immédiatement les critiques de Micky : imperméable à l’humour, elle traita sa fille de gamine inconsciente.

  Le lendemain, après une nuit entrecoupée de rêves de chevauchées aquatiques, Julie entama sa journée de travail au bureau du shérif. Il y régnait une grande effervescence. Le shérif avait réuni ses hommes pour un briefing, passant en revue tous les indices relatifs aux trois meurtres. Il demanda à chacun d’être aux aguets

 

 

 

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et de signaler tout détail ou comportement suspect. En fin de journée, comme souvent, il raccompagna Julie à la station-service, où ils prirent un café. Elle le quitta en disant :

— J’aimerais flâner un peu et prendre l’air avant de rentrer. D’un pas assuré, elle prit la route en direction de chez elle. À l’approche du bois, la lumière déclinait. Une voiture s’arrêta à sa hauteur. Elle était conduite par le propriétaire de la station-service.

— Montez, je vous raccompagne. Julie le remercia de son amabilité, tout en déclinant l’offre : elle souhaitait marcher un peu. Devant son refus, l’homme sortit une arme ! Muette de surprise, la jeune femme songea un instant à fuir mais, tétanisée de peur, elle obéit et s’assit à ses côtés. Il démarra aussitôt et s’engagea rapidement dans un chemin de montagne. Julie regardait anxieusement dans le rétroviseur, dans l’espoir de voir quelqu’un passer. Elle songea à sauter de la voiture en marche mais le canon de l’arme fermement appuyé sur ses côtes la paralysait. Soudain, elle reconnut l’endroit où ils étaient. C’était précisément là que le cadavre d’une des jeunes femmes avait été découvert. L’homme la poussa sans ménagement hors de la voiture et l’entraîna sur le sentier caillouteux. Elle sentait le canon de l’arme dans son dos et grimpait la pente abrupte ; soudain elle se retourna brusquement et tenta de repousser l’homme. Mais dans un réflexe, celui-ci lui saisit le poignet et entraîna Julie dans sa chute. Quand elle reprit connaissance, elle était attachée au tronc d’un arbre. Elle sentait du sang couler le long de sa tempe.

  Un cigare aux lèvres, assis sur un rocher, l’homme l’observait. Il souriait bizarrement et elle vit une lame briller dans sa main. Paralysée d’angoisse, elle ne voyait plus rien ; le sang et les larmes lui brouillaient la vue. Elle sentit confusément la lame faire sauter les boutons de son chemisier un à un, puis découper le haut de son pantalon.Elle eut la certitude que sa vie s’arrêtait là, un voile noir obscurcit son regard, elle s’évanouit.

  Le son d’une voix, calme et rassurante la ramena doucement à elle. Ses yeux s’ouvrirent sur un brouillard rouge, son esprit captif d’une image d’horreur.

 

 

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  Lentement une évidence s’impose à elle : l’homme qui lui parle, en nettoyant maladroitement son visage, lui demandant comment elle va, elle le connaît, c’est le shérif ! Elle se touche la main, le ventre, les cuisses… Elle n’est donc pas morte.

  Encore étourdie, elle s’assied, regarde autour d’elle. Une dizaine d’hommes inspecte chaque brin d’herbe.     Un peu à l’écart, solidement maintenu et menotté, elle remarque le garagiste. Il est embarqué sans ménagement dans un autre véhicule. Le shérif, lui, aide Julie à se lever et à marcher vers l’ambulance qui l’emmène à l’hôpital.

Tout au long du chemin, il lui tapotera l’épaule ou la joue en lui demandant :

— Are you O.K. ?(Ça va ?), plus pour se rassurer que dans l’attente d’une réponse.

  À l’hôpital, après avoir examiné Julie, un médecin lui sutura sa plaie à la tête. Le shérif, toujours inquiet, attendait fébrilement le diagnostic :

— Plus de peur que de mal, elle n’a rien de sérieux.

  Le visage du shérif montra un intense soulagement. Passablement choquée, Julie différa son retour à la maison ; elle avait eu très peur mais ne voulait inquiéter ni ses parents, ni son fils. Pour la laisser reprendre ses esprits, le shérif l’emmena à leur snack habituel, où ils partagèrent un chili con carne. Le shérif lui expliqua alors avoir remarqué le manège du pompiste : il quittait chaque fois la station, peu après le départ de Julie. Ce comportement bizarre avait incité le policier à le suivre. Un moment, il le perdit de vue, la route serpentant entre les rochers ; mais après avoir arpenté quelques chemins, il repéra des traces fraîches et appela des renforts.

  Julie, lui demanda de ne parler de cette aventure à quiconque, de peur d’inquiéter ses proches.

Le repas terminé, le shérif la raccompagna. Tout le monde dormait. Elle se glissa à l’intérieur à pas de loup, se dirigea vers sa chambre, prit une douche pour effacer les traces de sang séché et se coucha.

  Le lendemain matin elle remarqua avec plaisir l’absence d’hématome visible. Avant de quitter sa chambre pour se rendre à la cuisine, elle cacha la suture sous un serre-tête.

— Tu es rentrée bien tard hier ! dit Micky en lui versant du café.

 

 

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— Je suis restée tard au bureau pour aider le shérif : il n’avait plus le temps de mettre les dossiers en ordre, en raison des enquêtes en cours et, pour me remercier, il m’a invitée à dîner. À part cela, il n’y avait rien de spécial.

  Sa mère l’informa alors que le shérif avait téléphoné et donnait une semaine de congés à Julie pour qu’elle puisse se reposer.

— Tu vas pouvoir t’occuper de ton fils, ma chérie.

— En voilà une bonne nouvelle ! dit Julie avant de tremper les lèvres dans le réconfortant breuvage. Micky passa affectueusement la main dans les cheveux de sa fille et sentit la plaie.

— Mais comment t’es-tu fait ça ? demanda-t-elle en regardant la suture.

— Je rangeais des papiers, le téléphone a sonné et, en me relevant pour répondre, ma tête a heurté le coin d’un tiroir métallique resté ouvert.

  À ce moment la télévision locale annonça l’arrestation du tueur, alors qu’il s’apprêtait à commettre un nouveau meurtre. D’après les informations recueillies auprès du shérif du comté, la jeune femme était indemne et le criminel, pris en flagrant délit, était sous les verrous. Les habitants de la région pouvaient dormir tranquilles.

  Micky demanda à Julie si elle était au courant.

— J’ignorais l’arrestation du tueur, ça doit être pour cette raison que le shérif m’a fait classer des dossiers.

La conversation s’arrêta là, au grand soulagement de Julie. La semaine de congé était la bienvenue. Elle décida d’en profiter pour explorer les Rocheuses en compagnie de David et se rendre à la Chute de la Princesse Indienne, lieu magique dont la beauté et la quiétude lui insuffleraient une énergie nouvelle. Après ces vacances bien méritées, elle reprit le travail et l’hiver passa sans autre évènement notable qu’une magnifique tempête de neige.

 

 

                                                                                  * * *

 

 

  Un soir, au tout début du printemps, on entendit frapper à la porte. Micky fit entrer l’arrivant et David s’écria joyeusement :

— Papa, Papa !

  Le bambin s’accrocha au cou de son père.

 

 

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  Julie n’en croyait pas ses yeux ni ses oreilles. Cet instant, elle l’avait espéré, elle l’avait rêvé et maintenant, il était là, devant elle, serrant David dans ses bras. Julie s’y blottit à son tour.

  La joie des retrouvailles les ayant menés fort tard, il passa tout naturellement la nuit dans le mobil-home, partageant le lit de Julie. Bientôt il se mit à la caresser gentiment. Ses mains glissaient avec douceur sur sa peau. Julie frissonna mais, à sa surprise, ne ressentait plus rien, n’éprouvait plus de désir. La peau de Raymond avait un goût âcre. Elle subit son étreinte et alla jusqu’à simuler un plaisir factice. Terrassé par la fatigue du voyage, Raymond s’endormit.

  Julie, ne trouvait pas le sommeil ; elle était perplexe : cette étreinte ne lui avait procuré aucune joie. Était-ce dû à l’émotion de ces retrouvailles inattendues ? Indifférente, elle observait froidement l’homme endormi à ses côtés ; mais où donc était passé ce sentiment si fort pour Raymond ? Reviendrait-il ? Il lui fallait admettre l’évidence : elle ne l’aimait plus…

  Le lendemain, Micky ne prit pas de gants pour leur dire sa façon de penser : il était grand temps qu’ils se marient ! Deux jours plus tard, toute la famille partit pour Reno (NV), où les formalités de mariage sont parmi les plus expéditives au monde. David était ravi : Papa épousait Maman.

  Julie n’était pas folle de joie mais épouser Raymond lui semblait « raisonnable » pour leur fils. Elle ne fit aucun effort d’élégance pour cette occasion, qui lui semblait un pis-aller : un jean et un pull.

Dans les yeux de Raymond, elle ne vit guère plus d’enthousiasme. Si le seul moyen de récupérer David et le ramener en Belgique était d’épouser Julie, il l’épouserait.

 

  La chapelle, à Reno, était décorée de façon charmante. Micky, Douglas et deux passants servirent de témoins à ces étranges épousailles.  L'officiant prévoyait de oui de la jeune femme, Julie respira profondément, regarda le père de son fils, et répondit "Non !" sous le regard courroucé de sa mère.

  Au sortir de la chapelle, elle réalisa l'incohérence de la situation.  Pour tout discours, Micky prononça une ferme mise au point :

 

                                                                              

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